L'atelier
Les trois claviers
sous la direction de Marc Leuridan
présente:
Orgue: Pierre Schyven, système breveté Démontage et dossier: Marc Leuridan, facteur d'orgues Photos: Jean-Pierre Stevens Plans: Benoît Dugardyn Date: 1985-1997 (les travaux ne peuvent être poursuivis qu'en dehors des saisons musicales) |
L'orgue se situe dans les coulisses côté cour, dans un logement compris en hauteur entre le poste du régisseur et le premier cintre.
Sa disposition permettait, à l'origine, de sonner au-dessus de la fosse d'orchestre, entre les différentes colonnes de l'avant-scène et de la loge Royale. L'organiste était en contact visuel direct avec le chef-d'orchestre à travers un porte-musique vitré, les réseaux de la mécanique, et la claire-voie en trompe l'oeil.
Ensuite, pour satisfaire aux mesures de sécurité contre l'incendie, un voile métalique, complétant le rideau de fer, a été interposé entre l'avant-scène et l'orgue. Celui-ci ne sonne plus, depuis, que sous les cintres. De ce fait, son niveau sonore depuis la salle est devenu dérisoire et, le réglage de la mécanique, qui se faisait depuis le plateau, impossible.
B1. Volume total de l'orgue
hauteur : | 6 m |
profondeur : | 1,85 m |
largeur : | 4,50 m |
Ce volume est divisé en deux parties superposées.
La console et l'espace réservé à l'organiste
se trouvent donc inclus dans l'orgue; l'organiste, assis à
son banc, n'a d'autre possibilité de mouvement que de s'évader
par une échelle.
Les pompes du réservoir étaient actionnées depuis le plateau en dessous de l'orgue.
Ce mécanisme, abandonné depuis l'électrification
de la soufflerie, semble perdu.
B2. Remarque
Cette disposition très particulière et logique,
le fait que nous n'ayons trouvé aucune trace de modification
de l'orgue au cours du démontage, nous invitent à
penser que cet orgue n'a jamais changé de place. Toutes
les rumeurs suivant lesquelles cet instrument proviendrait d'une
église, nous semblent non-fondées. Nous verrons
que l'étude des archives leur laisse peu de chance du survivre,
même si elles devaient s'appliquer à un instrument
antérieur. En attendant, une étiquette "Montre
8' Théâtre" collée sur le plus grand tuyau
de ce jeu
, confirme cette thèse.
B3. La console
Une incrustation au-dessus des claviers :
"Pierre SCHYVEN & Cie BRUXELLES,
système breveté"
atteste l'origine de l'orgue
construit selon un procédé
dont Schyven détient le brevet depuis 1883.
Cet orgue, entièrement mécanique, est constitué de deux demi-sommiers à système breveté. Ce procédé consiste :
Ce système permet d'économiser un nombre important de tuyaux et donc de place. Bien qu'ingénieux, ce système comporte certains inconvénients :
Toutefois, ces inconvénients, regrettables pour une église, ne le sont pas pour le Théâtre, où l'illusion a plus d'importance que le rendu réel d'un orgue.
Disposition des règles de registres
Récit | Basson - Hautbois |
Grand orgue | Clairon Trompette Bombarde |
Grand orgue | appel d'anches |
Grand orgue | Fourniture |
Récit | Voix céleste |
Récit | Dolce Salicional |
Grand orgue | Viole de gambe |
Récit | Doublette Flûte harmonique 4' Flûte harmonique 8' |
Grand orgue | Prestant 4' Montre 8' Montre 16' |
Pédale | Octave basse |
Grand orgue | Flûte 4' Bourdon 8' Bourdon 16' |
Pédale | Soubasse |
Nous constatons que les jeux du Récit et du Grand orgue sont mélangés sur le sommier. La pédale est empruntée au Grand orgue.
B5. La tuyauterie
Les jeux réunis en accolade font partie d'un même rang.
Pédale | Grand orgue |
Octave basse![]() ![]() |
![]() Montre 8' Prestan 4' (tuyaux doublés dans les dessus) |
Soubasse![]() ![]() ![]() ![]() |
![]() Bourdon 8' Flûte 4' Fourniture 3 rangs Viole de gambe ![]() Trompette 8' Clairon 4' |
Récit | |
![]() Dolce 4' ![]() Flûte harmonique 4' Doublette 2' Voix céleste 8' ab c° Basson-Hautbois 8' (disparu mais a probablement existé) |
Cet orgue comporte donc neuf jeux réels dont un a disparu.
La seule transformation visible que l'orgue semble avoir subie consiste dans certains changements dans la disposition de la tuyauterie de bois. Ces changement seraient conscutifs à l'arrivée du voile coupe-feu qui isole l'orgue de la salle. Cette transformation semble fort ancienne et réalisée avec un soin identique à la construction originale. Or le rideau de fer a été installé en 1891.
C. État de l'orgue avant le démontage
C1. La tuyauterie
Les tuyaux métalliques sont en très bon état
général. Seuls quelques pieds se sont affaissés,
et les plus petits tuyaux ont souffert d'accords trop vigoureux.
L'harmonisation des anches est déficiente.
La tuyauterie de bois a souffert de la sécheresse.
Beaucoup de tuyaux sont décolés ou fendus.
Les porte-vent en p1omb doivent être restaurés.
C2. Le sommier
A l'instar des tuyaux de bois, les sommiers sont fendus ou décollés.
Les emprunts sont fort nombreux. Toute la peauserie des laies
doit être restaurée ainsi que les soupapes de retenue
des chapes gravées. Les faux-sommiers devenus cassants,
ainsi que leurs supports, doivent être restaurés
ou remplacés.
C3. La soufflerie
Le réservoir et ses pompes sont en bon état. Les principales fuites proviendraient des plateaux de fermeture qui sont largement fendus. Toutes les soupapes de retenue sont déteriorées.
Le ventilateur est en parfait état. Il pourrait cependant avoir souffert d'un choc au cours du démontage.
Les porte-vent en bois sont en bon état, mais leur démontage implique restauration.
C4. La mécanique
Typique de Schyven, cette mécanique est en fort bon état.
Toutefois les écrous de cuir devraient être remplacés
ainsi que quelques embouts de vergettes.
Pratiquement inexistant, le meuble doit être entièrement reconstitué, car il aura trop souffert du démontage, et surtout de l'activité théâtrale dont il aura servi de support.
D. Documentation
D1 documentation privée
Monsieur Fievez, collectionneur de documents concernant le Théâtre, nous a aimablement indiqué ce qui suit :
" C'est en cette année 1886-87 Que fut enfin ins tallé au Théâtre de la Monnaie le nouvel orgue qu'on demandait à grands cris depuis longtemps. Cet instru ment, digne de la première scène belge, sortait des ateliers de MM. Schyven & Cie; il est composé de vingt jeux et deux claviers, avec pédale séparée. "
( Jacques ISNARDON, Le Théâtre de la Monnaie depuis sa fondation jusqu'à nos jours, Bruxelles, 1890, SCHOTT frères, éditeurs, P. 631. )
Isnardon nous parle avec précision de l'orgue qui nous
occupe; reste à en découvrir les documents officiels.
D2. Ville de Bruxelles, Fonds de l'instruction publique N°2971
Le rideau de fer semble a.voir été construit en
1891. Cette machine jouera très rapidement un rôle
néfaste pour l'orgue .
D3. Ville de Bruxelles, Fonds des travaux publics N°
33475
Ce dossier nous parle en fait de l'achat, en 1856, par la Ville et pour le Théâtre, d'un orgue neuf construit par Hippolyte LORET, factenr d'orgues à LAEKEN.
Ce facteur devra se conformer aux instructions données par l'architecte POELART quant aux dimensions et forme du buffet. Cet orgue a donc bien été oonstruit à l'occasion des travaux de reconstruction du Théâtre. suite à l'incendie de 1855.
D'autre part, cet orgue semble avoir été placé
dans un esprit de continuité; le Théâtre disposait
en effet d'un orgue avant l'incendie.
![]() détail de l'abrégé ![]() |
Toutefois, le point où nous la laissons, nous permet de supposer que la présence de l'orgue au Théâtre de la Monnaie remonte loin dans le temps.
Cette présence relève-t-elle d'une nécessité spécifique au Théâtre ou bien d'une tradition générale?
Cette question, et le fait que notre orgue appartienne indiscutablement au patrimoine du Théâtre, nous invitent à être très vigilants pour sa bonne conservation.
Il est peut-être l'outil d'une activité musicale que nous aurions oubliée aujourd'hui.
E. Conclusion
Nous nous permettons donc ici d'indiquer les points essentiels qui devraient être respectés dans la restructuration du plateau.
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