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Raboter, v. a. Chiper, en général.

Ranger, v. a. Mettre en pâte. Ce mot est employé ironiquement et par antiphrase. Lorsqu'un homme de conscience laisse échapper de ses mains un compartiment de casse, un paquet de distribution ou tout autre objet, les compagnons charitables ne manquent pas de s'écrier, en appuyant sur le dernier mot: Ce n'est rien; c'est la conscience qui RANGE!

Rangs, s m. pl. Tréteaux sur lesquels les casses sont placées. Un rang est disposé pour deux compositeurs.

Rebiffer, v. intr. Recommencer.

Réclame, s. f. Mot qui se mettait autrefois à la fin d'une feuille, dans la ligne de pied, et qui se répétait au commencement de la feuille suivante. || Vérifier la réclame, c'est s'assurer que la fin d'une feuille concorde bien avec le commencement de celle qui suit immédiatement. || Au figuré, Ce qui reste dans une bouteille après que chacun a eu sa part: Ne t'en va pas, il y a la réclame, c'est-à-dire: il en reste encore un peu pour chacun de nous.

Reconnaissance, s. f. V. RÉGLETTE.

Registre (FAIRE LE), V. C'est, en imprimant la retiration, faire tomber exactement les pages l'une sur l'autre. || Au figure, c'est verser le contenu d'une bouteille de façon que chacun ait exactement sa part.

Réglette, s. f. Petite lame de bois ou de métal, mince et plate, de la hauteur des cadrats, et qui sert à justifier les pages en longueur. || Arroser la réglette. Lorsqu'un paquetier passe metteur en pages, il manquerait à tous ses devoirs s'il ne régalait son équipe; celle-ci, à son tour, fait une reconnaissance, c'est-à-dire paye la moitié (à revenir) de ce qu'a payé le nouveau metteur.

Renauder, v. intr. Murmurer, grommeler d'un air de mauvaise humeur; souvent synonyme de GOURGOUSSER.

Retiration, s. f. Verso de la feuille à imprimer, quand on tire en blanc. || Être en retiration, c'est avoir atteint la cinquantaine.

Rien, synonyme de BEAUCOUP. il est rien bête, celui-là. Cette expression saugrenue appartient plutôt à l'argot des margeurs et des receveurs qu'à celui des compositeurs. V. MINCE.

Ronchonner, v. intr. Murmurer, grommeler; synonyme de GOURGOUSSER et de RENAUDER .

Ronchonneur, s. m. Celui qui ronchonne.

Roulance, s. f. Tapage assourdissant que les ouvriers d'un atelier font tous ensemble en frappant avec leurs composteurs sur leur galée ou sur les compartiments qui divisent les casses en cassetins, sur les taquoirs avec les marteaux, en même temps qu'ils frappent le sol avec les pieds. Quand un sarrasin pénètre dans une galerie, quand un compositeur est vu d'un mauvais oeil, qu'il est ridicule, ou ivre, qu'il a émis une idée baroque et inacceptable, en un mot quand quelqu'un ou quelque chose leur déplaît, MM. les typographes le manifestent bruyamment par une roulance. Les roulances ne respectent rien: les protes, les patrons eux-mêmes, n'en sont pas à l'abri.

Rouler, v. intr. Aller d'imprimerie en imprimerie.

Rouleur, s. m. Ouvrier typographe qui roule d'imprimerie en imprimerie sans rester dans aucune, et qui, par suite de son inconduite et de sa paresse, est plutôt un mendiant qu'un ouvrier. Aucune corporation, croyons-nous, ne possède un type aussi fertile en singularités que celui dont nous allons essayer d'esquisser les principaux traits. Les rouleurs sont les juifs errants de la typographie, ou plutôt ils constituent cet ordre mendiant qui, ennemi juré de tout travail, trouve que vivre aux crochets d'autrui est la chose la plus naturelle du monde. Il en est même qui considèrent comme leur étant due la caristade que leur alloue la commisération. Nous ne leur assimilons pas, bien entendu, les camarades besogneux dont le dénuement ne peut être attribué à leur faute: à ceux-ci, chacun a le devoir de venir en aide, dignes qu'ils sont du plus grand intérêt.

Les rouleurs peuvent se diviser en deux catégories: ceux qui travaillent rarement, et ceux qui ne travaillent jamais. Des premiers nous dirons peu de chose: leur tempérament ne saurait leur permettre un long séjour dans la même maison; mais enfin ils ne cherchent pas de préférence, pour offrir leurs services, les imprimeries où ils sont certains de ne pas être embauchés. Si l'on a besoin de monde là où ils se présentent, c'est une déveine, mais ils subissent la malchance sans trop récriminer. De plus, détail caractéristique, ils ont un saint-jean, ils sont possesseurs d'un peu de linge et comptent jusqu'à deux ou trois mouchoirs de rechange. Afin que leur bagage ne soit pour eux un trop grand embarras dans leurs pérégrinations réitérées, ils le portent sur le dos au moyen de ficelles, quelquefois renfermée dans ce sac de soldat qui, en style imagé, s'appelle azor ou as de carreau. Un des plus industrieux avait imaginé de se servir d'un tabouret qui, retenu aux reins par des bretelles, lui permettait d'accomplir allègrement les itinéraires qu'il s'imposait. Ce tabouret, s'il ne portait pas César, portait du moins sa fortune.

Mais passons à la seconde catégorie. Ceux-là ont une horreur telle du travail, que les imprimeries où ils soupçonnent qu'ils en trouveront peu ou prou leur font l'effet d'établissements pestilentiels; aussi s'en éloignent-ils avec effroi, bien à tort souvent; car le dehors de quelques-uns est de nature à préserver les protes de toute velléité d'embauchage à leur endroit. D'ailleurs, si les premiers ne se présentent pas souvent en toilette de cérémonie, les seconds, en revanche, exposent aux regards l'accoutrement le plus fantaisiste. C'est principalement l'article chaussure qui atteste l'inépuisable fécondité de leur imagination. L'anecdote suivante, qui est de la plus scrupuleuse exactitude, pourra en donner une idée: deux individus, venant s'assurer dans une maison de banlieue que l'ouvrage manquait complètement et toucher l'allocation qu'on accordait aux passagers, étaient, l'un chaussé d'une botte et d'un soulier napolitain, l'autre porteur de souliers de bal dont le satin jadis blanc avait dû contenir les doigts de quelque Berthe aux grands pieds. Des vestiges de rosette s'apercevaient encore sur ces débris souillés d'une élégance disparue.

Au physique, le rouleur, n'a rien d'absolument rassurant. La paresse perpétuelle dans laquelle il vit l'a stigmatisé. Il pourrait poser pour le lazzarone napolitain, si poser n'était pas une occupation. Sa physionomie offre une particularité remarquable, due à la conversion en spiritueux d'une grande partie des collectes faites en sa faveur: c'est son nez rouge et boursouflé.

Lorsque, contre son attente, le rouleur est embauché, il n'est sorte de moyens qu'il n'emploie pour sortir de la souricière dans laquelle il s'est si malencontreusement fourvoyé: le plus souvent, il prétexte une grande fatigue et se retire en promettant de revenir le lendemain. Il serait superflu de dire qu'on ne le revoit plus.

Il est un de ces personnages qu'on avait surnommé le roi des rouleurs, et que connaissaient tous les compositeurs de France et de Navarre. Celui-là n'y allait pas par trente-six chemins. Au lieu de perdre son temps à de fastidieuses demandes d'occupation, il s'avançait carrément au milieu de la galerie, et, d'une voix qui ne trahissait aucune émotion, il prononçait ces paroles dignes d'être burinées sur l'airain: " Voyons! y-a-t-il mèche ici de faire quelque chose pour un confrère nécessiteux ? " Souvent une collecte au chapeau venait récompenser de sa hardiesse ce roi fainéant; souvent aussi ce cynisme était accueilli par des huées et des injures capables d'exaspérer tout autre qu'un rouleur. Mais cette espèce est peu sensible aux mortifications et n'a jamais fait montre d'un amour-propre exagéré.

Pour terminer, disons que le rouleur tend à disparaître et que le typo laborieux, si prompt à soulager les infortunes imméritées, réserve pour elles les deniers de ses caisses de secours, et se détourne avec dégoût du parasite sans pudeur, dont l'existence se passe à mendier quand il devrait produire. (UL. DELESTRE.)

Rupin, adj. Distingué, coquet, bien mis. N'est pas particulier à l'argot typographique . Quelques- uns diront RUPINOS.


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