La France


Lacaze (P.), En garde, du duel à l'escrime, Coll. Découvertes, Paris , Gallimard, 1991, pp. 37-38.

Au début du XVIIe siècle, le duel est en France un véritable fléau: entre 1588 et 1608, près de dix mille gentilshommes sont tués pour des questions d'honneur. Le pouvoir monarchique réagit. Sans supprimer le duel, il l'oblige, en le soumettant aux rigueurs de la loi, à moins de publicité tapageuse, à plus de clandestinité. Dans le même temps, les maîtres d'armes mettent au point, avec l'arme d'étude qu'est le fleuret, une technique nouvelle, particulière à la France.

Au cours des XVII et XVIIIe siècles, la pratique du duel resta l'apanage des grands. Pour brocarder ce privillège, on forgea un mot neuf: la duellemanie. Duellomane, ce baron d'Aspremont qui eut trois duel dans la même journée... Duellomane, ce chevalier d'Andrieux qui, à trente ans, s'était battu soixante-douze fois et qui promettait la vie sauve à ses victimes si elles reniaient Dieu, après quoi il les achevait pour avoir le plaisir de tuer "l'âme et le corps". Duellomane, ce monsieur de Saintes-Foix, ancien lieutenant de cavallerie qui "s'adonnait à des taquineries des plus agaçantes". En sortant du café Procope, il dit brutalement à un gentilhomme portant le bouc: "vous puez comme un bouc." Celui-ci releva le défi; ils croisent le fer et Saintes-Foix en profita pour renchérir: "Si vous me tuez, vous n'en puerez pas moins, mais si je vous tue vous en puerez d'avantage." Les duellistes s'affichaient avec provocation: à Paris, leur lieu de prédilection n'était plus le Pré-aux-Clercs en bordure de Seine. Ils se battaient en pleine rue. Le chevalier de Breteuil et le chevalier Gravelles ferraillèrent à midi, rue de Richelieu. Deux mousquetaires s'affrontèrent -comble du défi- devant Notre-Dame-des-Victoires.


Retour à l'index - Invite: Laissez-nous un mot pour signaler votre visite. - Suite
© La Maison de l'Escrime - Brussels - Réalisation: Synec.doc